Le modèle expansionniste ne fonctionne pas

Depuis quelques semaines voire quelques mois, chaque jours un peu plus, certains parlent de la chute d'un système. Et s'ils sont encore largement taxés de "pessimistes", "tenants de l'Apocalypse", voire "anarchistes" par les grands acteurs de ce système, force est de constater que cette hypothèse prend du sens et du corps au fur et à mesure que le temps passe.

Beaucoup tentent de contrer cette opinion par des arguments d'ordre économiques. Par comparaison avec la crise de 1929-1930 d'une part, comparaison galvaudée par les médias et qui, en effet, d'un point de vue purement économique, est favorable au système actuel : pas de taux de chômage à 25% dans les pays les plus riches (US, Allemagne, France), pas de faillite de 40% du secteur bancaire, pas de plongeon des masses monétaires ni de la production mondiale.

Par constatation des données et perspectives actuelles d'autre part : les grandes entreprises continuent d'engendrer des bénéfices, la consommation ne chute pas, les marchés émergents restent des moteurs de la croissance mondiale etc.

Ces arguments peuvent apparaitre valables, à condition d'y mettre comme postulat préalable la pérennité du système. Et c'est bien là que le bât blesse !

A force de les lires et les entendre, des périphrases comme "la croissance ralentit", "les bénéfices augmentent moins vite" ou encore "la progression des chiffres d'affaire est en baisse", nous paraissent triviales et nous ne prenons plus le temps de les analyser. Car en réalité, de quoi parlons-nous ? De baisse de l'économie, de récession, de dégradation ? Non ! Nous parlons seulement de progression plus lente de l'économie. Nous évoluons dans un système qui prône le "toujours plus", qui se désole que l'augmentation ralentisse, et qui ne peux envisager le statut quo. Et nous touchons là au cœur du problème et à la source de ce qui fait que l'hypothèse d'une fin du système apparait aujourd'hui pertinente.

Nous sommes à l'heure actuelle dans un système d'expansionnisme constant et immodéré. Ce type de système n'est pas nouveau. Bien que sa forme et ces modalités soient différentes, il est à rapprocher des modèles politiques expansionnistes qui ont fleuri au travers des siècles et des millénaires : l'Empire d'Alexandre le Grand, l'Empire Romain, l'Empire de Gengis-Kahn, les empires coloniaux des pays européens (XVIIe-XIXe siècles) ou encore, plus proche de nous, le IIIe Reich. S'il s'agit là de modèles politico-militaires, liés à un État particulier et non globalisés, il est nécessaire de rappeler qu'ils étaient intimement liés à un modèle économique (à l'exception notable du IIIe Reich, cas particulier qui intégrait une forte notion idéologique, et dont l'existence a été trop limitée pour qu'un modèle économique clair s'en dégage).

Sans exception, tous ces systèmes, devenus trop grand, trop lourds, inadaptables et instables, ont fini par mourir, à petit feu, détruits petit à petit par ce qui avait fait leur force.

C'est pourtant une leçon historique claire et ne souffrant aucune contestation : le modèle d'expansionnisme galopant ne fonctionne pas, est instable, et fini toujours par se détruire, d'abord de l'intérieur.

Nous nous sommes cru, pendant des années, meilleurs que nos ancêtres, aptes à ne pas reproduire les mêmes erreurs, trop intelligents, forts et progressistes pour commettre la moindre erreur. Le constat aujourd'hui est sans appel. Les leçons du passé nous rattrapent et à vitesse grand V.

Et, tout comme nos ancêtres, nous refusons de voir la réalité et de mettre en marche dès à présent un changement profond de système, seul rempart contre une véritable implosion qui mettra l'ensemble du monde à genoux. Car le système actuel est clairement en train de mourir, enlevons nos œillères. Deux choix s'offrent alors à nous : laisser le système continuer à se détruire et nous entrainer dans sa spirale vers le bas ; ou bien, faire, dès à présent, évoluer les choses, accepter que ne plus chercher à faire "toujours plus" est la solution et que, même, accepter qu'un petit retour en arrière peut-être bénéfique.

Des solutions existent, elles sont multiples et les compétences sont réelles. Mais avant toute chose, nous devons accepter de stopper notre recherche infernale de croissance illimitée et notre course en avant effrénée. Sans cela, rien ne sera possible.

Class of 1984